Parvenu à l’âge des bilans, Simon Cadique, réalisateur de séries télé, décide de se lancer dans la réalisation d’un film dont le sujet lui tient à cœur : rendre hommage à des figures injustement oubliées par l’histoire. Les frères Caudron, deux fils de la paysannerie picarde, furent à l’aube du XXe siècle des pionniers de l’aviation. Les machines volantes qu’ils fabriquaient prenaient leur envol au-dessus des plages de la baie de Somme. Lorsque Simon retourne dans ces lieux imprégnés des souvenirs de sa jeunesse, un phénomène étrange se produit : de mystérieuses marées du temps surgissent, brassant les années, contaminant le passé, le présent, le futur. Amitiés, richesses, amours, filiations : toutes les cartes sont en passe d’être rebattues.
Comment réagir quand tous les repères de notre vie s’effacent ?
#Comment ce livre m’est-il tombé entre les mains ?
Juste à temps m’a été proposé par les éditions Livre de Poche à l’occasion d’une réédition du tome. La thématique des voyages temporels m’étant chère, je n’ai pas hésité longtemps. Et encore merci pour leur confiance !
#Atterrissages non contrôlés
J’ai donc opté pour ce titre un peu par hasard. Je ne connaissais pas l’auteur, la thématique et le pitch me semblaient intéressants. Alors pourquoi ne pas tenter cette lecture ? J’ai eu une excellente intuition concernant cette histoire.
Juste à temps est a priori une histoire qui traite de voyage temporels. La belle affaire, encore des gens qui devront faire attention à ne pas écraser d’insecte pour ne pas condamner le futur. Oui… Mais non. Ici, la thématique est traitée de manière plutôt originale. Les protagonistes se retrouvent ballottés d’époque en époque par des vagues temporelles annonciatrices du pire.
L’écriture de Philippe Curval est très, vraiment très visuelle et fait preuve de minutie – parfois un peu trop poussée – dans les descriptions des paysages ou des personnages. Cette précision crée une proximité certaine du lecteur avec Cadique que l’on suit tout au long de l’histoire. Et cette relative intimité implique une grande empathie que je n’ai pas pu m’empêcher de ressentir devant ce protagoniste qui voit son quotidien et sa vie partir littéralement en poussière.
L’auteur sait construire des personnages aux réactions terriblement humaines, assaillis par la peur, le doute ou la colère. On s’habitue à leur présence et ils sont une véritable redécouverte à chaque fois, changements temporels oblige. Ces personnages possèdent d’ailleurs la faculté tellement humaine de s’accommoder de beaucoup de choses avant de s’effondrer, quitte à recommencer toute une vie depuis le début. Et ce portrait presque naturaliste de l’espèce humaine donne à réfléchir.
Et s’il n’y avait que ça… L’auteur profite du filtre de l’imaginaire pour dresser un portrait peu flatteur de l’immigration. Les personnes voyageant à travers les époques sont des réfugiés temporels… Dont les humains autochtones se méfient et qu’ils repoussent souvent. Et au lieu de les accepter comme tels, des réfugiés, ceux-ci doivent négocier le droit de vivre contre de la technologie. Pas vraiment flatteur comme portrait, n’est-ce pas ? Enfin, ce n’est que mon point de vue.
Je pensais que l’intrigue serait elle aussi plutôt classique. Mais en fait, je me suis retrouvée embarquée malgré moi dans les péripéties vécues par Simon Cadique et ses compères. J’ai ressenti les sensations d’urgence qui se dégagent de ce texte. Et à mesure que les pages défilent, on découvre toute la complexité de la construction de ce texte. Dans Juste à temps, le rythme, les rebondissements et l’entremêlement des intrigue sont maniés avec grand talent pour une lecture très complexe mais entraînante. Malgré l’impression de ne pas trop savoir où l’on va, tout s’achève en feu d’artifice – sans mauvais jeu de mot, vous saurez pourquoi ne lisant le livre – et dans une séquence très poignante.
#En Bref
Philippe Curval possède une écriture très particulière qui a de quoi désarçonner lorsqu’on entame la lecture de Juste à temps. Mais il ne faut surtout pas lâcher cette lecture en cours de route, car il s’agit réellement d’une pépite avec laquelle il faut compter. Alors, n’attendez pas !
Juste à temps.- Philippe Curval.- Ed. Le livre de Poche.- Disponible