Les Phénomènes de Corneghem – T2 Le Chiffonnier de la Nuit


– Qui est-ce le Chiffonnier de la Nuit ? demanda Mélanie interloquée. — C’est un personnage légendaire de notre pays de Flandre, répondit Walter Katt. Avez-vous déjà entendu parler de l’Ankou breton ? Oui, bien entendu… et vous savez que sa faux est redoutable. Elle fauche indistinctement pauvres et riches, faibles et puissants, les égalise sur le champ ! Notre Chiffonnier de la Nuit est tout aussi terrifiant. On dit qu’il ne faut pas prononcer son nom et qu’il apparaît toujours là où on ne l’attend pas.


Voilà le grand retour de l’univers féerique et attrayant de Patrice Michel dans ce second tome des Phénomènes de Corneghem ! Il m’avait laissée sur ma faim à la fin du premier volume en refermant les sentiers de ces Flandres merveilleuses dans les dernières pages…
Mais me voilà repartie sur les chemins de l’imaginaire de l’auteur comme une « voyageuse en Féerie » que j’adorerais être. Pas de comparaison possible avec le premier volume de la série, car il s’agit d’un processus totalement différent : on y retrouve Walter Katt, le forestier qui a été témoin d’une assemblée extraordinaire. Ici encore ses récits sont merveilleux, dans tous les sens du terme.
Il évoque ici des histoires mettant en scène l’au-delà dans lequel le cours habituel du temps n’a plus lieu, et surtout où les plus sceptiques perdent peu à peu leur confiance absolue dans la rationalité du monde qui les entoure. Car oui, la forêt de Corneghem et le village de Zutebecque sont décidément pleins de surprises, et mieux vaut ne pas s’y aventurer sans les conseils éclairés de notre conteur favori. Vous risquez bien de vous perdre, ou de faire des rencontres plus ou moins plaisantes…
Il ne s’agit pas uniquement d’un enchaînement de contes. Tous sont liés par un fil rouge qui est le but que semble s’être fixé Walter Katt d’ôter aux deux journalistes tout leur scepticisme. C’est encore un point qui doit être porté au crédit de l’auteur, nous dévoiler comptes et chansons à travers une trame narrative balisant tout le volume.
La plume de Patrice Michel est enchanteresse, merveilleuse. En une phrase il sait changer toute une atmosphère et nous emmener de plus en plus loin dans son imaginaire sans même que l’on s’en rende compte. L’oralité est si bien retranscrite que l’on a l’impression d’entendre la voix du conteur nous narrer ces histoires. Le temps disparaît réellement le temps de la lecture de ce recueil pour nous ramener (un peu trop) brutalement à la réalité lorsque l’on arrive à la dernière page. Mais la grande déception que j’ai ressenti est également l’une des caractéristiques qui font de ce recueil un livre inoubliable : l’envie d’y retourner qui nous fait rêver. C’est sûrement cela qui fait la valeur d’un livre.
Et comment ne pas évoquer les références multiples présentes dans ce récit ! On y retrouve tout le folklore du Nord de la France, celui du petit peuple et de l’Autre monde notamment, mais aussi des références à Pierre Dubois, grand connaisseurs des légendes de la région ! Du beau monde, je vous dis !
Le merveilleux dans ce recueil est présent jusque dans l’écriture du texte. A la lecture du premier tome, ne vous êtes-vous pas demandé si Corneghem existait ? Les détails réels s’imbriquent parfaitement au merveilleux et au surnaturel de cette histoire, une autre preuve du talent de l’auteur. Un recueil qui donne envie de se blottir au coin du feu, une bière fraîche ou un thé chaud à la main (selon la saison, adaptez!) en écoutant les histoires d’un conteur talentueux. Que faut-il de plus pour croire au merveilleux ? Pas grand chose.
L’auteur montre combien un peu de mystère dans la vie peut la rendre plus attrayante et plus belle ! L’influence du conte sur l’esprit de l’homme est loin d’être totalement réduite à néant, si tant est que celui-ci soit un peu réceptif aux images qu’il véhicule ! Je l’ai et le redis : l’imaginaire est ce qui donne de la couleur à un quotidien terne et malmené par le rythme infernal que la société l’oblige à tenir. Il est temps de se poser un instant et de prendre le temps d’observer, de réfléchir et d’écouter. Tout change alors subtilement autour de nous. Ou bien peut-être est-ce nous qui changeons notre regard sur le monde…
Le Chiffonnier de la nuit est donc un point de départ magique pour d’intenses et plaisantes divagations oniriques auxquelles je vous conseille de vous abandonner totalement lors de cette lecture. C’est aussi une véritable carte postale d’une région magique et belle dans ses traditions qui nous est offerte. Vous ne regretterez absolument pas le voyage !

Petit instant de confidence : j’ai été vraiment attristée de terminer ce livre, et je le suis tout autant mettre la dernière touche à cette critique, car celle-ci m’a permis de revivre un peu de la magie présente dans Les Phénomènes de Corneghem. Heureusement, je crois savoir qu’un tome trois est en préparation. Il ne reste donc plus qu’à attendre !

Les Phénomènes de Corneghem – T2 Le Chiffonnier de la nuit.- Patrice Michel.- 2013.- Ed. Atria

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