Les Chants de Felya

Aux confins de l’univers, loin du regard de la civilisation, se commettent les pires atrocités. Comme sur Felya, une planète d’extraction minière où la puissante compagnie Fetexport exploite toutes les ressources à sa portée : minérales, animales, végétales… et humaines. Pour les tribus indigènes, divisées, toute résistance est vaine. Que peuvent des lances contre des tanks et des hélicoptères ? Les unes après les autres, elles passent sous le joug de la compagnie : les hommes rejoignent les rangs de leur armée, les femmes leurs bordels. Puni pour avoir enfreint les coutumes de son peuple, le jeune Lorin doit prouver son attachement aux siens. Dans sa quête, il rencontrera Soheil, issue de la tribu des tailleurs de sel. Tous deux devront mettre de côté leurs différences s’ils veulent survivre aux épreuves dressées sur leur chemin. 

Et de leur amour naîtra peut-être l’étincelle de la rébellion, l’espoir attendu par toute une planète…


# Comment ce livre m’est-il tombé entre les mains ?

J’ai plusieurs fois entendu parler (en bien) de Laurent Genefort sans avoir eu l’occasion de le lire. Autant dire que je partais avec seulement un a priori positif mais aucune idée préconçue, en bien ou en mal. Je remercie Le Livre de Poche de m’avoir offert l’opportunité de découvrir cet auteur et ce titre ô combien intéressant !

# Portrait pessimiste de l’espèce humaine

Intéressant, mais guère flatteur concernant l’espèce humaine. Pas le genre de roman dont on ressort plein de philanthropie, tout au contraire. Mais qui donne à réfléchir, ça oui. On a beau transposer l’humanité dans un nouvel univers, il reste égal à lui-même si on lui donne un tant soit peu de pouvoir. Esclavage, torture mentale et physique, viol, racisme, xénophobie… rien n’est épargné à l’humanité qui est vraiment montrée sous son pire aspect.

On perçoit cet aspect à travers les yeux des peuples autochtones de Felya, particulièrement Lorin. Personnage plutôt attachant s’il en est, sûrement le plus attachant des trois histoires à mon sens. Et sans doute le protagoniste le plus fouillé et le mieux construit du texte. On suit ses péripéties et les épreuves qu’il traverse en se mettant à sa place. Et bien sûr, on ne peut s’empêcher de compatir à ses souffrances et ses humiliations. Ses réactions, ainsi que celles des autres personnages (malheureusement) sont vraiment crédibles et ce réalisme fait la grande force de cette histoire, mais aussi le talent de l’auteur.

Il s’agit d’un texte très complexe et l’intrigue se construit petit à petit autour d’un couple de personnages. J’avoue avoir été un peu déroutée en entrant dans l’histoire, car on atterrit au beau milieu d’un monde et on en découvre la richesse en mettant nos pas dans ceux des personnages. Cet univers est très développé et le choc des cultures est vraiment intéressant et très instructif. Mais cette plongée dans l’inconnu est loin d’être désagréable, bien au contraire.

Petit bemol, Laurent Genefort a utilisé quelques raccourcis totalement superficiels, comme pour éviter de développer certains passages de son histoire. Si j’ai apprécié son écriture de manière générale, ces ellipses ont un peu gâché ma lecture.

# En Bref

J’ai globalement apprécié cette histoire. Les personnages sont vraiment très bien construits et l’histoire est à la fois intéressante, facile à suivre et instructive. Mis à part les raccourcis abusif pris par l’auteur dans le texte, oui, je vous conseille Les Chants de Felya.

Les Chants de Felya.- Laurent Genefort.- Ed. Le Livre de Poche.- Disponible

Chroniques d’un rêve enclavé

« On ne bâtit rien sur le désespoir, fors la haine, mais avec la colère et l’usure des souffrances qui se répètent, avec la faim et la peur du lendemain, avec nos seuls coudes serrés pour nous tenir chaud, et nos larmes en écho, et nos rires enfuis, un jour, avec juste ça, entre hommes et femmes, nous n’aurons plus besoin que d’un rêve pour nous éveiller. »

Dans cette cité médiévale où règnent recruteurs, faiseurs de dîme et de gabelle, les poètes meurent, les rêveurs aussi. Les rêves, eux, ne demandent qu’à voyager. 

Parleur, vagabond visionnaire, parviendra-t-il à leur faire franchir les murs de la Colline ?



# Comment ce livre m’est-il tombé entre les mains ?


Les éditions Le livre de Poche m’ont fait l’honneur de choisir mon blog pour un partenariat. J’ai donc pu sélectionner ce titre parmi quelques autres. Je ne connaissais Ayerdhal que de nom et je n’ai donc pas pu découvrir ses textes de son vivant… Ce que je regrette après avoir lu Chroniques d’un rêve enclavé.

# De l’imaginaire engagé

Bien entendu, que c’est possible ! Chroniques d’un rêve enclavé est l’histoire d’un idéal, d’un rêve de liberté et de libre-arbitre dans un monde régi par un système féodal fort et répressif. Un monde dans lequel une poignée de personnages hauts en couleur ont décidé malgré tout de prendre leur vie et leur destin en main et mènent une résistance à leur manière. 

Ayerdhal ne se propose pas uniquement d’effleurer un sujet sans approfondir sa position comme peuvent le faire d’autres auteurs. Au contraire. Ici, les personnages s’engagent dans un processus irréversible et mettent en jeu bien plus que leurs simples idéaux

Se dégage de ce texte une grande réflexion à propos du droit inhérent (dans notre propre société en tout cas) de l’Homme à disposer de lui-même sans être asservi d’aucune manière. Ce qui peut nous sembler comme allant de soi dans notre démocratie ne l’a pas toujours été et ne l’est pas dans d’autres pays du globeEt par extension, je pense que ce texte fait relativiser sur les défauts de notre système politique.

Dans ce texte, chaque personne disposant d’un peu de pouvoir ne peut s’empêcher de l’utiliser pour favoriser les siens, même de manière totalement inconsciente. Dans toute décision, qu’elle soit politique ou non, on peut donc se demander ce qui anime inconsciemment la personne qui en est à l’origine. Par l’intermédiaire de Parleur,  Ayerdhal nous offre une paire de lunette des plus importantes, celle qui nous permet de voir à travers les grands discours pour débusquer son sens caché.

L’intrigue s’articule autour de l’évolution de cette réflexion. Je vous l’assure, elle tient en haleine tellement, partagés entre l’espoir et le pessimisme. Curieux partage je vous l’avoue, mais au final pas si étrange que ça : l’espoir de voir les plans de la Colline aboutir à une vie meilleure et le pessimisme de connaître le genre humain qui fait redouter la fin de l’histoire. Rassurez-vous, je ne vous dévoilerai rien de celle-ci !

L’écriture est vraiment bien maîtrisée. De la première à la dernière page, chaque mot est savamment dosé, le texte fluide et l’ambiance se prête à la réflexion, même au plus fort de l’action. Fluide… jusqu’aux dernière pages où tout explose. Ce bouquet final, bien construit, m’a tout de même secouée par sa brutalité et sa violence. Ce n’est qu’avec un peu de recul que j’ai eu l’occasion d’apprécier toute la beauté de ce final.
Un mot enfin sur les personnages. Ceux-ci sont nombreux et ont des rôles variés à jouer dans l’histoire. Nous les voyons à travers le regard, décillé il est vrai de la sœur d’un poète rebelle assassiné par le pouvoir en place. Les descriptions physiques ne sont pas légion dans ce texte, ce qui laisse plus de place aux idées que les protagonistes véhicules, le point fort du texte. Leur dessin psychologique est très fin et vraiment bien travaillé. Ils semblent vraiment humains dans leurs faiblesses et leurs moments de force.
Ayerdhal propose quelques archétypes judicieusement choisis, de ceux sont actes et paroles ont une portée immense, du genre qui dépasse le simple cadre du texte. Et ça, c’est fort.

# En Bref

Oui, j’ai apprécié Chroniques d’un rêve enclavé. D’abord parce que l’histoire est captivante. Ensuite, parce que la réflexion qui s’en dégage retient l’esprit longtemps après que le livre est refermé. Et enfin, parce que le texte et la plume de l’auteur sont vraiment bons !

Lisez-le !

Chroniques d’un rêve enclavé.- Ayerdhal.- Ed. Le Livre de Poche.